Alain Naze, La philosophie plébéienne est dans l’escalier

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Si j’ai choisi ce titre pour mon intervention, ce n’est pas pour signifier que la « philosophie plébéienne » serait une philosophie « de concierge », quelque sens, péjoratif ou non, qu’on pût donner à cette expression, mais bien pour indiquer son caractère introuvable. A l’image d’une concierge qu’on aurait bien des difficultés à situer dans un immeuble à plusieurs cages d’escalier, la philosophie plébéienne présenterait cette même condition fuyante, en l’occurrence en ce qu’elle apparaîtrait comme rétive à toute définition arrêtée. En cela, déjà, on peut identifier un premier trait par lequel la philosophie plébéienne se distinguerait d’une philosophie patricienne : la première ne peut exhiber quelque lignage que ce soit sans se renier (en restaurant la forme d’une figure tutélaire), ce qui implique qu’on la pense comme intrinsèquement orpheline. Or, si la philosophie patricienne ne présente pas cette difficulté de définition, c’est d’abord parce qu’elle s’arrache à ce qui constituerait son autre, sur la base d’une « histoire » de sa naissance et de son développement – avec ses pionniers (les Présocratiques), son enfer (le sens commun), ses représentants canoniques (Platon, Kant, Hegel), etc. Cette philosophie patricienne et occidentale semble donc assurée de son propre, par-delà la multiplicité qui la traverse, quand la philosophie plébéienne, elle, serait si peu assurée à cet égard, qu’elle ne pose pas même la philosophie patricienne dans un rapport d’altérité radicale, faisant au contraire si souvent des emprunts auprès d’elle – là serait la dimension parasitaire d’une philosophie plébéienne. Ce qu’en revanche elle ne lui emprunte pas, c’est l’idée d’une totalité qui permettrait de restaurer un propre caractérisant cette philosophie plébéienne, car si tel était le cas, elle ouvrirait la voie à une histoire de la philosophie concurrente de celle existante (à l’image d’une simple « contre-histoire de la philosophie »), qui, quant au fond, ne s’en distinguerait plus que par le fait de n’être pas encore écrite. C’est parce que le fragment est premier en philosophie plébéienne que son éclatement ne peut être attribué à une chute de la concierge dans l’escalier – la concierge est un peu à l’image du dieu circulaire de Nicolas de Cues, la centralité en moins, partout et nulle part à la fois1 toujours seulement dans les fragments. Mais on sait pourtant qu’elle est dans l’escalier, autrement dit qu’elle présente une consistance effective. C’est à justifier cette condition nécessairement fragmentaire d’une philosophie plébéienne que s’attachera cette intervention, ce qui doit s’entendre pourtant à rebours de toute tentative d’instaurer en cela la moindre orthodoxie plébéienne.

Il serait sans doute assez ridicule, mais aussi contradictoire d’envisager la philosophie plébéienne comme adossée à un projet de forme cartésienne, consistant en l’occurrence à faire table rase de la philosophie patricienne, c’est-à-dire de la philosophie officielle – par exemple telle qu’elle s’illustre dans les manuels scolaires. Ce serait ridicule parce que cela reviendrait précisément à former le projet d’une nouvelle orthodoxie (selon laquelle rien ne pourrait inspirer une philosophie plébéienne de ce qui serait dégagé du corpus de la philosophie patricienne), et parce qu’on conférerait ainsi au projet plébéien un aspect monumental emportant avec lui la désignation d’un propre (parce qu’un tel dessein serait alors visé en dehors de toute démarche du type « marronnage »). Contre ce risque, il s’agirait donc de recommencer autrement que ne le font ordinairement les Français, selon Deleuze, et bien davantage à la manière des Anglais et des Américains, c’est-à-dire, « par le milieu » : « Le recommencement français, c’est la table rase, la recherche d’une première certitude comme d’un point d’origine, toujours le point ferme. L’autre manière de recommencer, au contraire, c’est reprendre la ligne interrompue, ajouter un segment à la ligne brisée, la faire passer entre deux rochers, dans un étroit défilé, ou par-dessus le vide, là où elle s’était arrêtée. Ce n’est jamais le début ni la fin qui sont intéressants, le début et la fin sont des points. L’intéressant, c’est le milieu »2. Si la philosophie plébéienne présente bien une consistance, ce n’est pas en tout cas celle que pourrait présenter un bloc, dans son aspect massif et localisable, et il y a donc bien lieu de se démarquer de l’entreprise cartésienne visant à procurer un fondement assuré à l’édifice de la mathesis universalis, dont la philosophie aurait constitué le sommet. Loin de ce modèle d’une philosophie couronnée, c’est bien plutôt en tant que flux discontinu que la philosophie plébéienne peut consister, coulant souterrainement, ou jaillissant en plein jour à certaines occasions. Autant dire que cette dimension plébéienne travaille souterrainement les formes plus aristocratiques de la philosophie, non pas à l’image d’une marge, qui pourrait coexister pacifiquement avec une philosophie ainsi réassurée dans sa centralité même, mais plutôt à l’instar d’un explosif, qui fissure, ici ou là, l’édifice imaginaire de la philosophia perennis.

On pourra soutenir que certains auteurs présentent bien cette condition explosive, quand d’autres sembleraient nettement plus orthodoxes, et comme engoncés dans les cadres d’une philosophie officielle. La figure de Nietzsche, du point de vue de sa teneur en dynamite, pourrait paraître exemplaire, mais aussi celles de Hamann, de Benjamin, de Stirner, ou encore celle du philosophe/théosophe Swedenborg, et la liste pourrait être poursuivie encore longtemps de ces philosophes chez lesquels on identifierait bien, spontanément, la présence d’un geste plébéien. Il est par conséquent des noms d’auteurs qui semblent consoner avec ce qu’on cherche à désigner ici comme cette puissance de renversement de la philosophie patricienne, et il n’est pas contestable que certaines pensées présentent une allure, un style, un ton qu’on peut légitimement qualifier de plébéiens. C’est cependant à de multiples niveaux qu’une telle puissance plébéienne pourrait être détectée, car c’est aussi de manière plus cachée, plus enfouie que les choses se jouent vraiment (y compris du côté des noms et des œuvres qu’on rattache à une allure patricienne de philosopher), et il serait sans doute plus intéressant de chercher à discerner des régimes hétérogènes du philosopher traversant peut-être chaque écriture philosophique, et inquiétant l’ordonnancement de la philosophie à laquelle elle travaille (raison pour laquelle il n’y a guère de sens à chercher un philosophe tout patricien ou tout plébéien – il y aurait plutôt lieu de rechercher les puissances d’estrangement, comme dit le vieux français, également à l’œuvre, là où l’on ne s’y attendrait peut-être pas). C’est alors une sorte de puissance de dérèglement de l’ordre propre à un système de pensée, venant ainsi lézarder l’édifice philosophique en cours d’élaboration, ou constituant son irrépressible point de fuite, ou inversement son point hyperbolique venant hystériser le système, qu’il s’agirait de détecter pour cerner l’impulsion plébéienne venant s’exercer sur une pensée. Pour ce dernier cas (celui de l’hystérisation d’un système de pensée), considérons ce moment où Schopenhauer, dans son Essai sur les apparitions, cherche une confirmation de sa métaphysique dans les phénomènes occultes, c’est-à-dire, demande confirmation de son système, élaboré de façon rationnelle, auprès de phénomènes aussi sujets à caution que les visions, pour ce qu’elles témoigneraient en faveur de la volonté elle-même, jugée alors seule susceptible, en l’absence de toute autre cause, de mettre les choses (comme des tables) en mouvement. Quant au cas d’un dérèglement de l’ordonnancement du système, on pourrait évoquer la démarche kantienne de la troisième critique, qui bouleverserait le sens de l’édifice critique, tel qu’il s’était patiemment constitué à travers les deux premières, du moins si l’on suit la lecture de Kant qu’effectue Deleuze, puisqu’il s’agirait alors de considérer l’ensemble des trois Critiques selon la logique de l’Analytique du sublime développée seulement dans la dernière Critique, la Critique de la faculté de juger, c’est-à-dire sur la base d’un nécessaire accord originellement indéterminé des facultés. Dans de telles occurrences, la dimension plébéienne à l’œuvre dans la philosophie constituerait cet élément hétérogène, venant sauver l’entreprise philosophique de sa folie identitaire, soit à travers le mouvement centrifuge d’une ligne de fuite ouvrant sur un dehors (ce qui se joue, par exemple, bien que de façon inaccomplie, dans l’intervention, au sein de la phénoménologie de Merleau-Ponty, de l’idée d’une expérience originaire et « sauvage »), soit à travers un mouvement de déplacement, de décentrement du système (le cas de Kant, selon la lecture qu’en effectue Deleuze), soit encore, inversement, à travers une exaspération centripète du système, rendant perceptible cette folie à l’œuvre (le cas de Schopenhauer relativement aux phénomènes d’apparitions). On serait alors face à une puissance plébéienne d’affolement, ou d’irruption, ou encore d’interruption, autant de régimes propres à cette puissance, et venant nous sauver de la folie mauvaise, si l’on veut, dans le sens où la folie qui menace serait la folie identitaire du système fermé sur lui-même, de la pensée assurée de son propre à chaque étape de sa progression réglée. En de telles occasions, il y aurait donc manifestation d’un élément plébéien, au sein d’une philosophie identifiée comme relevant d’un mode patricien de philosopher, c’est-à-dire manifestation d’un élément hétérogène au système en lequel il intervient. Cette puissance plébéienne présente donc quelque chose de déroutant, à la fois en sa dimension déconcertante (de l’inattendu surgit), mais aussi en sa capacité à brouiller les pistes, à provoquer des embardées hors des routes balisées, même de la part des cylindrées pourtant les plus sûres de l’histoire de la philosophie. Dans ces conditions, cette puissance plébéienne, du fait même de sa capacité de fragmentation, fait valoir les droits du fragment lui-même, pour ce qu’elle témoigne de la faculté disruptive de celui-ci, étant entendu que l’insertion pacifique d’un tel fragment dans un tout ne pourrait alors que révéler son homogénéité au milieu qui l’accueille – ce qui le nierait comme fragment, le reconduisant alors au statut d’élément séparé de façon seulement momentanée d’un tout, qu’il serait appelé à réintégrer, pour s’y résorber. Il importe cependant d’insister sur le fait que cette puissance du dehors ne doit aucunement être placée en relation de face à face vis-à-vis de la philosophie patricienne – ce dehors n’est que la face externe de cette dernière, comme nous l’ont montré les exemples de Kant et de Schopenhauer, et comme nous l’aurait montré la tentative de Merleau-Ponty, si elle avait abouti, puisque l’intériorité d’un système ne peut être affectée que par ce qui n’en constitue pas l’autre absolu, mais se donne dans l’allure du pli. Cette puissance plébéienne, ce serait un peu le bruit, le charabia, que la philosophie naissante, en Grèce, posait pourtant comme l’autre du logos, comme un élément irréductiblement barbare, alors qu’en tant qu’ennemi identifié, cet élément fondait malgré tout, certes de façon négative, la possibilité même de la philosophie – l’identité de la philosophie naissante s’avère donc inséparable, irréductiblement solidaire de ce qu’elle pose comme extériorité. C’est donc à rebours de cette figure adverse que la philosophie naissante s’est assurée de son propre, et donc, pour inquiéter ce propre, il peut être judicieux de réactiver la figure de la barbarie – sans sortir d’une pratique de la philosophie, donc, mais seulement en créant un écart vis-à-vis du régime patricien de la philosophie.

Par ce geste, dans le domaine de la philosophie, on renouerait ainsi notamment avec quelque chose de la démarche politique et philosophique d’Ernest Cœurderoy, qui, dans son pamphlet Hurrah !!! ou La Révolution par les Cosaques, en en appelant à une régénération de notre civilisation par une invasion barbare, n’ouvrait pas la voie à un récit faisant concurrence à l’histoire des vainqueurs (c’est-à-dire à un discours visant à l’hégémonie), mais faisait ainsi jouer un récit mineur, opposé à celui, grandiloquent, du « progrès » : « Je vous dis, moi, qu’il n’y a de vie pour vous que dans l’universelle ruine. Et puisque vous n’êtes pas assez nombreux dans l’Europe occidentale pour que votre désespoir fasse brèche, cherchez en dehors de l’Europe occidentale. Cherchez et vous trouverez. Vous trouverez au Nord un peuple entièrement déshérité, entièrement homogène, entièrement fort, entièrement impitoyable, un peuple de soldats. Vous trouverez les Russes. Si vous me dites que ce sont des Cosaques, je vous répondrai que ce sont des hommes. Si vous me dites qu’ils sont ignorants, je vous répondrai qu’il vaut mieux ne rien savoir que d’être docteur ou victime des docteurs »3. Alain Brossat commente ainsi cette stratégie discursive : « Le « petit récit » de la régénération des peuples « fatigués » (Nietzsche) d’Occident par le jeune sang slave bouillonnant (« petit récit » par opposition au « grand récit » de l’antagonisme entre l’Occident civilisé et l’Orient barbare) se présente comme la forme disponible dans laquelle va se couler l’entreprise de Cœurderoy : un projet qui tourne autour de l’identification et la récupération de tout ce qui constitue le refoulé ou le dénié de la discursivité politique des vainqueurs […] »4. Autrement dit, à travers ce geste iconoclaste, Cœurderoy ouvre la voie à une histoire des vaincus, constituée par tout ce que l’histoire des vainqueurs a laissé sur le bord de la route, à titre de rebuts. Ce sont autant de fragments, d’éclats qui ne présentent certes par la belle continuité de la geste du progrès par laquelle la civilisation occidentale a cherché à se ressaisir dans son mouvement d’auto-constitution, mais qui, par là même, sont susceptibles de « faire brèche ». C’est en ce sens que l’idée de philosophie plébéienne a partie liée au fragment et à une histoire des vaincus : il s’agit bien aussi, dans l’optique d’une telle philosophie, de faire remonter à la surface des auteurs mineurs (comme Deleuze a pu parler d’une « littérature mineure »), ou jugés comme excentriques (à l’image de Cœurderoy justement), mais encore d’envisager comme riches en philosophie des discours, des œuvres, des gestes non explicitement philosophiques, et ainsi, de rouvrir des virtualités inexploitées de pensée, et d’action, c’est-à-dire à la fois d’arracher le passé à son caractère révolu, et d’identifier dans notre présent des éclats de pensée et de gestes. Une philosophie plébéienne pratique donc des brèches dans la philosophie patricienne, brisant ainsi la continuité de son histoire, créant un arrêt révolutionnaire pourrait-on dire, dans l’optique de Walter Benjamin.

On peut donc dire que l’idée d’une philosophie plébéienne est indissociablement philosophique et politique en sa portée. Parce qu’elle nous conduit à faire remonter au jour des écrits, des événements, des gestes que l’histoire des vainqueurs (l’histoire en général, et de la philosophie en particulier) avait tenu pour négligeables (respectivement au regard du supposé mouvement de l’histoire et de la rationalité philosophique), parce qu’elle réside dans de tels fragments, à l’image d’un courant électrique les traversant, la philosophie plébéienne est intrinsèquement subversive – si en cela elle peut être dite anarchiste, alors, elle l’est de manière principielle, à l’image de l’anarchie propre à la philosophie de Stirner, entendue comme processus indéfini de destitution des principes, et donc des formes d’autorité (en cela même philosophie plébéienne), autrement dit entendue comme le transcendantal de toute action comme, indissociablement, de toute pensée insurrectionnelles.

De la philosophie naissant dans la Grèce de la fin du VIIe et du début du VIe siècle avant Jésus-Christ, on a pu dire, légitimement, qu’elle était essentiellement liée à l’émergence de la Cité grecque (la polis), et qu’à ce titre, elle relevait d’une forme de rationalité essentiellement politique. Tout cela est bien connu, mais ne cesse pourtant d’interroger : c’est à une forme déterminée de politique, nécessairement, que renvoie la philosophie occidentale naissante, et plus précisément, à une forme de politique faisant du langage sa condition de possibilité. C’est en cela que les cyniques grecs, en ne respectant notamment pas les règles de politesse de la discussion philosophique – et non pas en adoptant l’attitude seulement silencieuse, propre à la figure du sage – effectuent un geste profondément plébéien. Et si ce geste cynique trouve peut-être chez Socrate lui-même son origine, alors, la manière dont la philosophie plébéienne travaille souterrainement la philosophie patricienne pourrait apparaître encore plus clairement : dans les références canoniques à Platon, la philosophie patricienne ne peut en effet empêcher les virtualités plébéiennes d’être toujours présentes, de se manifester, au moins sur le mode du refoulement.

On connaît le caractère spectaculaire et provocateur des interventions des cyniques grecs, et c’est en cela qu’ils constituent une source d’hétérogénéité, non seulement vis-à-vis de la philosophie, mais plus largement à l’égard de la culture grecque en général : Diogène aboyait à la manière d’un chien (il voulait également être enterré comme un chien), et on se souvient qu’il lui arrivait de sa masturber en public. Un tel usage performatif du langage (langage élargi aux expressions corporelles) se situe bien évidemment en rupture vis-à-vis des règles du discours usant des diverses ressources du logos, en vue de convaincre et/ou de persuader. Mais l’essentiel est peut-être ailleurs, en ce que si l’attitude des cyniques grecs, relevant de la parrêsia, participe bien d’un courage relatif au fait de dire la vérité, c’est surtout du côté des formes de pratique de soi que le scandale cynique se manifeste, la notion de « vraie vie », pensée à partir des conditions de la « vie cynique », venant alors s’opposer radicalement au platonisme, et à travers lui, à ce qu’on a ici appelé la philosophie patricienne. Mais avant d’aborder ce point, on n’oubliera pas de rappeler la filiation qu’établissait Platon entre Socrate et les cyniques, en parlant de Diogène comme d’un Socrate qui serait devenu fou, ni d’indiquer la qualité de parrèsiaste de Socrate, telle que l’établissait Michel Foucault, dans son cours de 1984, Le courage de la vérité, et qu’il distingue de la qualité spécifique du « sage » : « Le parrèsiaste […] n’est pas quelqu’un qui se tient fondamentalement dans la réserve. Au contraire, son devoir, son obligation, sa charge, sa tâche, c’est de parler, et il n’a pas le droit de se dérober à cette tâche. […] Socrate […] le rappelle dans l’Apologie bien souvent : il a reçu du dieu cette fonction d’aller interpeller les hommes, d’aller les prendre par la manche, d’aller leur poser des questions. Et cette tâche, il ne l’abandonnera pas. Même menacé par la mort, il mènera sa tâche jusqu’au bout, jusqu’à son dernier souffle. Alors que le sage se tient dans le silence et ne répond que parcimonieusement, le moins possible, aux questions que l’on peut lui poser, le parrèsiaste, lui, est l’indéfini, le permanent, l’insupportable interpellateur. Deuxièmement, alors que le sage est celui qui, précisément sur fond de son silence essentiel, parle par énigmes, le parrèsiaste, lui, doit parler, parler aussi clairement que possible. Et enfin, alors que le sage dit ce qui est, mais dans la forme de l’être même des choses et du monde, le parrèsiaste, lui, intervient, dit ce qui est, mais dans la singularité des individus, des situations et des conjonctures. Son rôle spécifique, ce n’est pas de dire l’être de la nature des choses. […] Le parrèsiaste ne révèle pas à son interlocuteur ce qui est. Il lui dévoile ou l’aide à reconnaître ce qu’il est »5. On ne peut qu’être sensible à cette ombre de la mort, si présente ici dans les propos de Foucault, et pas seulement dans leur contenu – il s’agit là en effet de son dernier cours, il va bientôt mourir, et il évoque la tâche à laquelle le parrèsiaste ne peut se dérober, « jusqu’à son dernier souffle », et qui consiste à « interpeller les hommes, […] les prendre par la manche, […] leur poser des questions ». Quant au fond de ce qu’énonce ici Foucault, il décrit le parrèsiaste, au nombre desquels il compte Socrate, comme ce personnage de l’Antiquité, constituant cet « autre » dont on aurait besoin pour pouvoir dire, soi-même, la vérité sur soi. Ainsi, c’est parce que le parrèsiaste userait d’un franc-parler qu’il libérerait, chez l’individu, la possibilité de dire la vérité sur lui-même, c’est-à-dire de se constituer comme sujet disant la vérité sur lui-même. Mais, dans le début de ce cours de 1984, Foucault nous fait aussi part du fait qu’il s’est rapidement aperçu que la parrêsia est d’abord et avant tout une notion politique – ce qui l’a conduit à opérer, à partir de cette notion, un nouage essentiel, le reconduisant au centre de ses propres recherches : « Avec la notion de parrêsia, enracinée originairement dans la pratique politique et dans la problématisation de la démocratie, puis dérivée ensuite vers la sphère de l’éthique personnelle et de la constitution du sujet moral, […] on a […] la possibilité de poser la question du sujet et de la vérité du point de vue de la pratique de ce qu’on peut appeler le gouvernement de soi-même et des autres. […] L’articulation entre les modes de véridiction, les techniques de gouvernementalité et les pratiques de soi, c’est au fond ce que j’ai toujours essayé de faire »6. De ce point de vue, la parrêsia constitue bien un objet à privilégier, pour Foucault, parce que, permettant d’analyser les rapports entre vérité, pouvoir et sujet, elle ne relève plus seulement d’une prise de parole risquée, mais s’inscrit véritablement dans l’épaisseur de l’existence. Du coup, il ne s’agit plus du tout, en effet, pour le parrèsiaste, d’un dire-vrai relatif à l’être du monde et des choses (qu’il considérera comme un savoir inutile), comme c’était le cas pour le sage, mais bien d’un dire-vrai adressé à son interlocuteur, et lui dévoilant ce qu’il est. Autrement dit, si la parole du sage peut prendre une valeur de prescription, en tout cas, soutient Foucault, « ce n’est pas [sous] la forme d’un conseil lié à une conjoncture, mais dans celle d’un principe général de conduite »7 – à l’inverse du parrèsiaste, donc, dont les conseils sont adressés aux individus singuliers, et aux situations particulières. Il faudrait bien sûr suivre ici patiemment les méandres de la réflexion de Foucault, dans tout ce cours, pour saisir le nouage qu’il effectue entre éthique individuelle, politique et pratiques de soi, à partir de la notion de parrêsia, reliant ascèse, gouvernement de soi, orientation vers la vérité et stylisation de sa propre existence, mais dans les limites de cette intervention, on peut au moins chercher à dessiner les contours de l’opposition qu’il trace entre la « vraie vie » (alêthès bios), telle qu’elle se redéfinit sous l’influence des cyniques, et sa version platonicienne, sous la forme d’un monde intelligible transcendant.

Pour résumer les choses, Foucault cherche d’abord à identifier les principes de la « vraie vie », non chez Platon lui-même, mais du côté de la vulgate platonicienne, et il en reconnaît quatre essentiels : l’alêthès bios, ce serait premièrement « une vie non dissimulée, […] une vie qui ne recèle aucune part d’ombre » ; ce serait ensuite « la vie sans mélange, sans mélange de bien et de mal, sans mélange de plaisir et de souffrance, sans mélange de vice et de vertu » ; ce serait, troisièmement, « une vie droite, […] une vie conforme aux principes, aux règles et au nomos » ; et enfin, dernièrement, « cette vraie vie [serait] une vie qui échappe à la perturbation, aux changements, à la corruption et à la chute, et se maintient sans modification dans l’identité de son être »8. Quant aux cyniques, Foucault envisage les principes à partir desquels ils ont pensé « la vie cynique, du bios kunikos en tant que vraie vie »9, c’est-à-dire quels principes ils ont posé à la base de la « vie philosophique ». Il en identifie d’abord quatre, très communs et traditionnels, relativement aux philosophies de l’époque, auxquels viendra cependant s’en ajouter un cinquième, qui fera toute la différence. Commençons par les quatre principes assez banals : le premier principe fait de la philosophie « une préparation à la vie » – « Ou tu te pendras, ou tu prépareras ta vie selon le logos » (évocation d’un aphorisme prêté à Diogène) ; deuxièmement, « cette préparation à la vie […] implique que l’on s’occupe avant tout de soi-même » ; le troisième principe, lui aussi, présente un aspect très familier, selon lequel « il faut, pour s’occuper de soi-même, n’étudier que ce qui est réellement utile dans et pour l’existence » ; quant au quatrième principe, il prône une conformité de sa propre vie avec les préceptes qu’on défend10. C’est par référence à ces quatre principes que Foucault a pu définir la philosophie cynique comme un « éclectisme », et par référence au cinquième principe qu’il l’a qualifié comme un « éclectisme à effet inversé » : « éclectisme, car il reprend bien quelques-uns des traits les plus fondamentaux qu’on peut trouver dans les philosophies qui lui sont contemporaines ; à effet inversé, parce qu’il fait de cette reprise une pratique révoltante, pratique révoltante qui a instauré, non pas du tout un consensus philosophique, mais au contraire une étrangeté dans la pratique philosophique, une extériorité, et même une hostilité et une guerre »11. On retrouve là, dans le cadre de la démarche des cyniques, ce qu’on envisageait préalablement comme certaines des caractéristiques d’une philosophie plébéienne : une dimension parasitaire (en l’occurrence, ici, faire son marché auprès des philosophies traditionnelles), mais aussi le fait d’introduire une « étrangeté » dans le régime ordinaire du philosopher, et par là même, de créer un effet d’extériorité, d’hétérogénéité, et donc de conflit, contre cette homogénéité philosophique, qu’on identifiait tout à l’heure comme une folie identitaire. Voyons donc ce cinquième principe de la « vie philosophique », qui changerait tout selon Foucault : c’est le principe selon lequel il faut parakharatein to nomisma », c’est-à-dire « altérer, changer la valeur de la monnaie », principe obscur, qui a fait l’objet d’un grand nombre d’interprétations. Or, malgré cette diversité de significations possibles, Foucault indique que ce précepte peut prendre une valeur négative (« une altération malhonnête de la monnaie »), ou positive (« un changement de l’effigie portée sur la monnaie, […] qui permet de rétablir la vraie valeur de cette monnaie »)12 Pour préciser les choses, Foucault rappelle par ailleurs que si le terme nomisma renvoie en effet à la monnaie, il renvoie aussi au vocable nomos, désignant la loi, la coutume – et alors, on serait renvoyé à ce qui semble être le sens originaire de l’expression, en même temps que la façon dont elle était probablement comprise : « altérer le nomisma, c’est aussi […] changer la coutume, rompre avec elle, briser les règles, les habitudes, les conventions et les lois »13. L’essentiel est en tout cas de cerner, en cette expression, le principe d’un renversement, d’une inversion de sens introduite dans la pratique philosophique – et c’est bien un tel « éclectisme inversé » qu’on retrouve dans la définition de la bios kunikos, très proche de celle par laquelle, traditionnellement, on définissait la « vraie vie », mais qui, dans le même mouvement, la subvertit radicalement.

Foucault relève les quatre caractères par lesquels un commentateur d’Aristote interprète le sens qu’on peut donner à l’expression de « vie cynique » (bios kunikos), et cette interprétation semble avoir été alors canonique. Il relève d’abord que cette « vie de chien » renvoie à une vie « sans pudeur, sans honte, sans respect humain », c’est-à-dire à « une vie qui fait en public et aux yeux de tous ce que seuls les chiens et les animaux osent faire » ; pour deuxième caractère d’une telle vie, ce commentateur reconnaît l’indifférence : la vie cynique serait une vie de chien, en ce qu’elle serait « [i]ndifférente à tout ce qui peut arriver, […] attachée à rien, […] se content[ant] de ce qu’elle a, […] sans autres besoins que ceux qu’elle peut satisfaire immédiatement » ; troisièmement, une telle vie serait une vie de chien, parce que c’est « une vie qui aboie, une vie diacritique […], c’est-à-dire une vie capable de se battre, d’aboyer contre les ennemis, qui sait distinguer les bons des mauvais, les vrais des faux, les maîtres des ennemis » – dit autrement, c’est une « vie de discernement qui sait faire les preuves, qui sait tester et qui sait distinguer » ; dernier caractère, enfin, de la vie cynique : « [c]’est une vie de chien de garde, une vie qui sait se dévouer pour sauver les autres et protéger la vie des maîtres »14. Or, comme le relève Foucault, on s’aperçoit aisément que les quatre caractère définissant la bios kunikos, la vie cynique, sont très proches de ceux par lesquels, traditionnellement on définissait la « vraie vie », mais en même temps, ils en subvertissent le principe : « Au fond, la vie cynique est à la fois l’écho, la continuation, le prolongement, mais aussi le passage à la limite et le retournement de la vraie vie (cette vie non dissimulée, indépendante, droite, cette vie de souveraineté). Qu’est-ce que la vie d’impudeur, sinon la continuation, la poursuite, mais aussi le retournement, retournement scandaleux, de la vie non dissimulée ? »15. La vie indifférente, elle, ne serait que le prolongement et le retournement scandaleux de la « vie sans mélange », de la « vie indépendante », caractérisant la « vraie vie ». Quant à la « vie diacritique », aboyante, distinguant entre le bien et le mal, elle serait tout autant prolongement et retournement scandaleux de la « vie droite », conforme au nomos. Et pour finir, la « vie de chien de garde, vie de combat et de service »16, elle, constituerait le prolongement et le retournement scandaleux de la vie souveraine, maîtresse d’elle-même propre à la « vraie vie ». En reprenant les principes les plus traditionnels de la « vraie vie », mais en les déplaçant de l’espace du logos à l’existence elle-même, les cyniques leur font subir une torsion qui révèle la fausseté de la monnaie des vies non cyniques qui se présentaient pourtant comme la « vraie vie ». Foucault résume ainsi l’effet de ce retournement : « Reprenant ces principes les plus traditionnels, les plus conventionnellement admis, les plus généraux de la philosophie courante, du seul fait qu’on leur donne comme point d’application, comme lieu de manifestation, comme forme de dire-vrai l’existence même du philosophe, on met, par la vie cynique, en circulation la vraie monnaie avec la vraie valeur. Le jeu cynique manifeste que cette vie, qui applique vraiment les principes de la vraie vie, est autre que celle que mènent les hommes en général et les philosophes en particulier »17. Sous ce rapport, les cyniques poseraient bien une question essentielle pour la philosophie, et que Foucault formule ainsi : « la vie, pour être vraiment la vie de vérité, ne doit-elle pas être une vie autre, une vie radicalement et paradoxalement autre ? ». Cependant, Foucault précise aussitôt que les cyniques se référaient à un « modèle socratique » où cette question prenait bien la forme d’une « vie autre », et non pas celle de « l’autre monde », ce qu’il justifie en soutenant que la démarche des cyniques, à l’encontre du choix qui marquera l’origine de la métaphysique occidentale, s’inscrirait dans le sillage du « souci socratique de soi », tel qu’il émerge du Lachès, et non pas de l’Alcibiade. C’est que pour Foucault, dans la lignée du texte de l’Alcibiade, le souci de soi nous conduisait jusqu’à « la question de ce qu’est, en sa vérité, en son être propre, ce dont il faut se soucier. Qu’est-ce que ce « moi », ce « soi » dont il faut se soucier ? », et ces questions, ajoute-t-il, nous amenaient à découvrir que c’était de l’âme qu’il fallait se préoccuper, que c’était l’âme qu’il fallait contempler, pour finir par y découvrir « le monde pur de la vérité » venant s’y refléter – « dans cette mesure-là, l’Alcibiade fondait bien, à partir du souci de soi, à travers l’âme et la contemplation de l’âme pour elle-même, le principe de l’autre monde »18. A l’inverse, en partant cette fois du Lachès, toujours selon la lecture de Foucault, le même problème du « souci de soi » nous conduit alors à la question « non pas de savoir ce qu’est en sa réalité et en sa vérité cet être dont je dois m’occuper, mais de savoir ce que doit être ce souci et ce que doit être une vie qui prétend se soucier de soi », autrement dit, on n’est pas alors conduit vers un autre monde, mais plutôt vers « la question de l’art de vivre et de la manière de vivre », et sur cette ligne, poursuit Foucault, « on ne rencontre pas le platonisme et la métaphysique de l’autre monde. On rencontre le cynisme et le thème de la vie autre »19.

Le fait que Foucault nous fasse remarquer que la ligne qui, partant du souci de soi, et passant par l’Alcibiade, ait donné naissance au platonisme, puis au néo-platonisme, et plus généralement à ce qu’on a pu appeler la métaphysique occidentale, alors que la ligne qui, partant pareillement de la question du souci de soi, mais passant en revanche par le Lachès, elle, n’ait « rien [donné] de plus en un sens que la grossièreté cynique », tout en relançant cependant « comme question à la fois centrale et marginale par rapport à la pratique philosophique, la question de la vie philosophique et de la vraie vie comme vie autre »20, tend à confirmer la dimension plébéienne de la philosophie cynique. De fait, elle n’a pas donné naissance à une descendance philosophique bien établie, bien identifiable, mais elle a parcouru souterrainement l’histoire de la philosophie, à travers la manifestation récurrente, sous des formes variées, de la question de « la vraie vie comme vie autre », c’est-à-dire de la question de la manière de vivre, de l’ethos propre à une vie philosophique. Le caractère plébéien du geste cynique se trouve d’ailleurs confirmé par le fait que Foucault ne considère pas que les deux lignes qu’on vient d’envisager aient été tout à fait étrangères l’une à l’autre : « Après tout, le platonisme a lui aussi posé la question de la vraie vie dans la forme de l’existence autre. Et on a vu que le cynisme, justement, pouvait parfaitement se brancher, se combiner, se lester de spéculations philosophiques assez étrangères à la tradition rustique, rudimentaire et fruste du cynisme lui-même »21. En effet, c’est ici l’impureté de la philosophie plébéienne qu’on retrouve, qui n’existe pas comme un bloc face à l’édifice de la philosophie patricienne, mais qui circule comme un flux dans les soubassements de cet édifice, dans ses interstices, jusqu’en des lieux où l’on ne se serait pas attendu à la trouver – elle est cette puissance qui, pour inquiéter la philosophie patricienne, ne peut pas lui être absolument étrangère, mais doit en constituer le dehors.

Pour finir, j’aimerais revenir sur le pluriel auquel se réfère le sigle CRDPP – Centre de Réflexion et de Documentation sur les Philosophie Plébéiennes. C’est qu’en effet, si j’ai pu être amené à parler de « la » philosophie plébéienne, à partir du moment où j’évoquais toujours les multiples modalités susceptibles d’être les siennes, les différentes allures qu’elle pouvait prendre, les différentes stratégies qu’elle pouvait adopter, la pluralité était en fait toujours très présente, malgré l’usage de l’article défini et singulier, qui n’avait d’autre fonction que de faire signe vers une puissance commune à tous ces éléments divers, dont la diversité même indique des modalités différenciées d’actualisation de cette puissance. Mais c’était déjà la dimension fragmentaire de cette philosophie plébéienne, sans cesse affirmée ici, qui empêchait de reconstituer une unité substantielle susceptible de faire face à celle qui caractérise, même de manière fantasmatique, la philosophie patricienne – la philosophie plébéienne fait défection de ce point de vue, ne se présentant aucunement comme rivale de la philosophie patricienne. On dira donc des philosophies plébéiennes qu’elles sont moins des unités philosophiques constituées, et distinctes les unes des autres, que des fragments philosophiques, pouvant troubler la surface de la philosophie patricienne, mais pouvant tout aussi bien se manifester hors du champ disciplinaire identifié comme philosophique, pouvant aussi charrier des types d’affects différenciés, des modes d’action, d’intervention différenciés, des styles très divers, des rythmes variés, des musicalités singulières. A chacun sa manière d’actualiser ces puissances plébéiennes, à l’œuvre dans un certain nouage entre la pensée et la vie, ou plutôt à chacun ses manières d’actualiser ces puissances. Léo Ferré, que j’aime à citer, dans un style qui n’appartenait qu’à lui, justement, faisait à l’occasion profession d’être un chien – référence explicite aux cyniques, lui qui disait ne pas écrire comme de Gaulle, ou comme Perse, mais causer, et gueuler, comme un chien. C’est bien d’ailleurs à travers cette subversion cynique qu’il pouvait, dans le sillage revendiqué et renversé de la poésie courtoise, produire un énoncé comme : « Ton style, c’est ton cul », qu’il prolonge par ces mots : « Ton style, c’est ma loi, quand tu t’y plies, salope » – le tout sur une musique n’ayant pourtant rien à envier à celles qu’il avait composées pour mettre en musique certains poèmes d’amour d’Aragon. Alors, pour joindre à présent le geste à la parole, et conformément au précepte énoncé dans « T’es rock, coco », j’aimerais, au terme de cette intervention, et si j’osais, lâcher ici mon humanité, et m’en aller – à quatre pattes…

1 « Dieu est un cercle dont le centre est partout et la circonférence nulle part » (Nicolas de Cues).

2 Gilles Deleuze, in Gilles Deleuze, Claire Parnet, Dialogues, Paris, Flammarion, 1986, p.50.

3 Ernest Cœurderoy, Hurrah !!! ou La Révolution par les Cosaques, Londres, 1854, p.21.

4 Alain Brossat, « Hurrah !!! ou La tentation du cosaque », in A. Brossat dir., Ernest Cœufrderoy (1825-1862). Révolution, désespoir et prophétisme, Paris, L’Harmattan, 2004, p.83.

5 Michel Foucault, Le courage de la vérité. Le gouvernement de soi et des autres II, Paris, Seuil / Gallimard, 2009, p.19.

6 Id., p.10.

7 Id., p.18.

8 Id., p.204-208.

9 Id., p.213.

10 Id., p.219-221.

11 Id., p.214 (je souligne).

12 Id., p.221.

13 Id., p.223-224.

14 Id., p.224.

15 Id., p.225.

16 Id.

17 Id., p.225-226.

18 Id., p.227.

19 Id.

20 Id., p.227-228.

21 Id., p.228.

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